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De l’usine Bonafont à la maison des peuples : les communautés prennent possession de l’usine d’embouteillage de Puebla

mardi 17 août 2021

"142 ans après la naissance d’Emiliano Zapata, les habitants de Juan C. Bonilla, à Puebla, ont repris l’usine Bonafont [appartenant à la multinationale Danone], bloquée depuis quatre mois. Ils cherchent à transformer l’usine d’embouteillage en une Maison des Peuples, un espace de résistance et d’éducation".

Texte et photos : Arturo Contreras Camero

JUAN C. BONILLA, PUEBLA - Tout d’abord, les habitants de la région ont fait le procès du mauvais gouvernement qui a permis (et permet toujours) l’installation de projets industriels dans la région. Ils l’ont déclaré coupable ainsi que les entreprises qui sont arrivées. Le crime : extraire et polluer sans mesure l’eau, les rivières et les puits des peuples de la région. Ils sont ensuite entrés dans l’usine d’embouteillage de Bonafont, dans la municipalité de Juan C. Bonilla, se sont dirigés directement vers le puits d’eau qui était exploité et l’ont fermé.

"En guise de punition, ils vivront avec l’humiliation que le peuple a récupéré ce qu’il méritait ! Nous avons décrété la réappropriation du territoire que la société Bonafont avait saisi pendant 29 ans. Les installations et tous les biens qu’elles contiennent seront occupés par tous les villages. Tous les droits pour les villages ! Santé, éducation, logement, terre, travail, indépendance, information, égalité, liberté, démocratie, justice et paix. Nous, les peuples unis, sommes les gardiens de la Terre Mère. Quiconque l’attaque recevra le châtiment du peuple !" entend-on au micro alors que les gens franchissent le portail d’entrée de l’usine.

Il y a un peu plus de quatre mois, le 17 mars, ces mêmes personnes ont fermé l’usine d’embouteillage, d’où sortaient jour et nuit des bonbonnes d’eau. Ils ne pouvaient plus tolérer l’exploitation excessive du précieux liquide. Certaines des personnes les plus âgées du village, dont les noms sont omis par crainte de représailles à leur encontre, se souviennent de l’époque où il y avait des ameyales, des sources et des jagüeyes dans ces terres, mais aujourd’hui elles sont toutes sèches.

Selon une estimation de La Jornada de Oriente, 20 jerricans d’eau sont mises en bouteille chaque minute dans la région, ce qui équivaut à plus de 1,7 million de litres d’eau par jour. Il y a trente ans, lorsque l’activité de mise en bouteille de l’eau a commencé dans la région, les populations locales ont commencé à voir le niveau des puits baisser et les flux d’irrigation diminuer.

Il s’agissait d’une occupation très attendue, au moins depuis 2008, lorsque les habitants de la même région avaient symboliquement fermé l’usine d’embouteillage. Aujourd’hui, la saisie n’est pas symbolique ; dans l’espace d’environ 9 000 mètres carrés, équipé de salles de classe, il est prévu de créer un espace communautaire, une sorte de maison de la culture appelée Casa de los pueblos (« Maison des peuples »).

C’est pourquoi, ce dimanche 8 août, jour de l’anniversaire du général Zapata comme on s’en souvient volontiers par ici, les 19 villages touchés par cette usine et d’autres se sont réunis pour envoyer le message le plus fort et le plus puissant possible contre des entreprises comme celle-ci.

Avant de reprendre les installations de l’usine d’embouteillage dans la municipalité de Juan C. Bonilla, les habitants des environs ont organisé un procès de toutes les industries qui extraient trop d’eau et la polluent.

Sur place se trouvaient des représentants des villages de San Juan Tlautla, San Gabriel Ometoztla, San Mateo Conalá, San Lucas Nextetelco, Santa María Zacatepec, Colonia José Ángeles, San Diego Cuachayotla, San Lucas Atzala, Santa María Coronango, Santa Bárbara Almoloya, San Sebastián Tepalcatepec, San Miguel Xoxtla, San Juan Cuautlancingo, San Martín Texmelucan, San Martín Zoquiapan, San Francisco Ocotlán, Santa María Acuexcomac, San Buenaventura Nealtican, San Francisco Coapa, tous de l’Etat de Puebla. Ils ont également reçu le soutien des membres du campement de protestation Mexicali Resiste, qui lutte contre une brasserie dans le nord du pays, et de la communauté Otomí de Mexico en résistance.

L’une des femmes otomi présentes a rappelé les liens qui unissent la lutte des villages de Puebla à celle des indigènes de Mexico :

"Aujourd’hui, nous voyons le liquide vital manquer à de nombreuses sœurs et dans de nombreux États. Il y a des années, nous pouvions boire de l’eau cristalline et jouer dans les rivières, mais plus maintenant, à cause de leurs politiques mensongères. Aujourd’hui, comment peuvent-ils avoir le culot de nous dire qu’ici cela aurait fourni du travail, aujourd’hui nous leur disons que c’est un mensonge, que l’argent de l’entreprise est étranger et que les bénéfices sont emportés dans d’autres pays, alors qu’ils nous laissent sans ressources, sans eau, sans vie".

Les impacts de l’industrie

De leur côté, les autres habitants de la région ont pris l’initiative de signaler les effets non seulement de cette usine, mais aussi de nombreuses autres industries qui s’approprient les ressources en eau de la région. Comme les habitants de Tlaxcalancingo, qui ont dénoncé que l’entreprise Junghans y fait la même chose ; ils extraient 800 bouteilles d’eau par jour, selon ceux qui le dénoncent. À Ocotepec, Coca-Cola extrait et gaspille des millions de litres d’eau, tout comme les élevages porcins de Caro ou les champs de culture de l’entreprise Driscolls, qui opèrent également dans la région.

Ou comme cela s’est produit à Cuautlancingo, qui, après avoir bénéficié d’eau pendant des années, n’en reçoit aujourd’hui qu’une fois par semaine, car la voracité de l’usine Volkswagen, qui produirait 30 véhicules par minute et utiliserait jusqu’à 400 millions de litres par unité, a asséché les terres voisines.

Du puits situé à l’intérieur de son usine d’embouteillage, Bonafont extrayait un nombre indéterminé de litres d’eau. Certaines estimations affirment que de toutes ses usines situées autour de Puebla et du volcan d’Iztaccihuatl, elle obtenait 1 400 000 litres par jour.

Arturo Contreras

Source : journal web Pie de pagina

Traduction provisoire


voir aussi :

LA SCIENCE POUR LE PEUPLE, LA VIE ET L’HUMANITE, communiqué des Villages Unis de la région de Cholula et des volcans