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Chronique d’Oaxaca, 8 novembre 2006.

Annick Stevens

jeudi 9 novembre 2006

Chronique d’Oaxaca, 8 novembre 2006

Le gouverneur Ruiz est lâché par le gouvernement fédéral

Le ministre de la politique intérieure, Carlos Abascal, a déclaré dans une conférence de presse que le gouverneur d’Oaxaca, Ulises Ruiz, devait, ou bien parvenir à un pacte de gouvernement avec ses opposants et obtenir une trêve pour montrer qu’il était capable de gouverner, ou bien donner sa démission. Le ministre a refusé d’évoquer un possible chantage du PRI, qui menacerait d’être absent à la cérémonie d’investiture de Felipe Calderón.
Il a annoncé que, si le fédéral n’avait pas le droit de destituer un
gouverneur d’État, en revanche il existait des moyens légaux pour le
contrôler :

    1. un audit de la gestion des ressources fédérales reçues par l’État ;
    2. une enquête judiciaire sur la responsabilité du gouverneur dans les violences perpétrées par des paramilitaires.

Cependant, il s’est refusé à avancer une date pour le retrait de la police fédérale de la capitale oaxaquénienne, celle-ci étant, selon lui, nécessaire "pour garantir la sécurité des citoyens".

La situation sur place

Ce mercredi, l’APPO doit remettre une proposition au gouvernement fédéral dans laquelle elle demande la destitution de plusieurs hauts mandataires de l’administration Ruiz, comme condition pour entamer des négociations avec le ministre de l’intérieur.

Les étudiants estiments nécessaire de maintenir les barricades qui
défendent l’université et la radio. En effet, la situation est toujours
dangereusement tendue : des agressions sporadiques de la part de policiers ont encore eu lieu contre des indigènes ou contre des habitations ; la radio du gouvernement, Radio Ciudadana, continue à émettre des appels à la haine contre les professeurs et les militants de l’APPO ; des inconnus cagoulés ont détruit un fast-food à coups de cocktails Molotov.
La chambre des députés a refusé au président l’autorisation de partir en
voyage officiel au Vietnam et en Australie, estimant que la gravité de la
situation requérait sa présence dans le pays. Un député de son propre
parti s’est demandé non sans humour : "Pourquoi veut-il aller au Vietnam,
puisqu’il a le sien ici ?"

Les actions futures

L’APPO appelle tous les groupes de lutte, formels ou informels, à envoyer
des délégués à un congrès constitutif à Oaxaca, du 10 au 12 novembre, qui
aura les objectifs suivants :

    1. Constituer formellement l’Assemblée populaire des Peuples d’Oaxaca
    2. Discuter et approuver les statuts, principes, programme et propositions de l’Assemblée nationale des peuples d’Oaxaca
    3. Élire le premier Conseil national des peuples d’Oaxaca, qui sera l’organe de coordination et de représentation de l’APPO
    4. Approuver le plan d’action à court, moyen et long terme.

L’organisation souligne à cette occasion que sa lutte ne se limite pas à
chasser "le tyran Ruiz" mais a pour objectif de transformer profondément
l’organisation politique de l’État pour répondre aux demandes des peuples qui l’habitent.

Les attentats à la bombe du DF revendiqués par cinq groupes de guérilla

Les attentats à la bombe qui ont secoué la ville de Mexico la nuit de
dimanche à lundi ont été revendiqués en commun par cinq groupes de
guérilla : le Mouvement révolutionnaire Lucio Cabañas Barrientos (MR-LCB), la Tendance démocratique révolutionnaire - Armée du peuple (TDR-EP),
l’Organisation insurgée 1er mai, la Brigade de justice 2 décembre et les
Brigades populaires de libération. Ces organisations avaient déjà annoncé
à la presse le mois dernier qu’elles passeraient à l’action si la police
fédérale réprimait violemment la contestation à Oaxaca. Dans leur
communiqué, elles reprennent les revendications de l’APPO et dénoncent en
outre la fraude électorale et "la violence néolibérale institutionalisée".
Malgré cette revendication, les autorités judiciaires n’excluent pas la
possibilité que ces groupes ne soient pas les auteurs des attentats mais
"profitent de l’opportunité pour se montrer". En tout cas, aucun
mandataire judiciaire ou politique n’accuse l’APPO ou le PRD d’en être
responsables, comme on l’avait tout de suite craint. Le ministre de la
Sécurité publique, Eduardo Molina Mora, a déclaré l’état d’alerte contre
la menace d’autres attentats, ce qui consiste à renforcer la surveillance
policière et militaire des ports, terminaux aériens et routes fédérales.

Annick Stevens.

Sources : La Jornada, les communiqués de l’APPO et de diverses
associations indigènes.