Comité de solidarité avec les peuples du Chiapas en lutte

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Pour le village de Santa María Ostula, État du Michoacán, Mexique

Congrès national indigène

jeudi 2 février 2012

AU PEUPLE DU MEXIQUE ET AUX PEUPLES DU MONDE
AUX PEUPLES INDIGÈNES DU MEXIQUE
À LA SOCIÉTÉ CIVILE NATIONALE ET INTERNATIONALE
AUX COMPAÑEROS DE LA OTRA CAMPAÑA

Nous, peuples, nations, tribus et quartiers du Mexique, nous disons ce qui suit :

Pour les agresseurs et assassins du village nahua de Santa María Ostula,
ni pardon ni oubli ! Rien que l’application de la justice pour qu’ils
soient châtiés !

Santa Maria Ostula (juillet 2009)

Sœurs et frères du village nahua d’Ostula, dans la zone côtière sur le
Pacifique de l’État du Michoacán, recevez le respect et l’affection de nos
peuples, nations tribus et quartiers qui constituent le Congrès national
indigène dont vous êtes vous-mêmes un pilier fondamental.

Compañeras et compañeros de la société civile - du Mexique et du monde -
nous vous demandons de la façon la plus humble de nous accompagner dans
cette dénonciation face au monde pour défendre le courageux village
d’Ostula (État du Michoacán, Mexique) qui lutte pour sa terre, son
territoire, sa culture, la paix, la justice et la liberté.

Aujourd’hui, au début de cette année 2012, nous, les oubliés de toujours,
nous manifestons notre présence. Nous sortons des entrailles profondes où
la spoliation, la répression, l’humiliation et l’exploitation nous
maintiennent et prétendent nous faire disparaître. Nous sortons de la mer,
de la montagne et du désert pour vous dire qu’aujourd’hui, dans un village
digne et rebelle que nous connaissons sous le nom d’Ostula, se mène une
guerre ouverte et inégale contre les habitants, hommes, femmes, enfants,
jeunes et vieillards, qui essaient seulement de vivre de façon digne et
pacifique. Mais le grand capital, avec ses modernes chercheurs de trésors
et ses pirates actuels du narcotrafic, essaie de les dépouiller de leurs
terres pour les utiliser comme une marchandise de plus.

Nous dénonçons la fausseté des déclarations du gouvernement du Michoacán
et de celui de la Fédération mexicaine quand ils prétendent qu’à tout
moment ils ont fourni aux frères d’Ostula la protection qu’ils leur
devaient. Au contraire, la tromperie et la répression sont la constante.
Un exemple en est la disparition forcée de quatre de nos frères : le
mineur Enrique Domínguez Macías, Francisco de Asís Manuel, Javier Martínez
Robles et Gerardo Vega Orcino.

Nous dénonçons le fait que, ces deux dernières années, ont été assassinées
vingt-huit personnes de Santa María Ostula, nos frères en totalité. Dans
les deux derniers mois de l’année dernière ont été assassinés Pedro Leyva
et J. Trinidad de la Cruz Crisóforo, qui sont toujours - bien qu’ils se
trouvent dans le lieu qu’occupent les lumières et les ombres de nos morts - membres du Congrès national indigène, de même que tous les frères et
sœurs du village nahua d’Ostula.

Nous dénonçons le fait que le 6 décembre 2011 notre frère J. Trinidad de
la Cruz Crisóforo a été assassiné avec la complicité des forces armées de
la Marine et de la Police fédérale préventive. Tous les assassinés étaient
des comuneros et leur seul délit a été de défendre la terre, leur
territoire et la volonté de leur peuple.

Nous réaffirmons que les terres d’Ostula sont la propriété ancestrale de
la communauté, que cette propriété a été reconnue par la résolution
présidentielle du 27 avril 1964, et que la communauté dispose de titres de
propriété depuis 1802. Nous dénonçons le fait qu’actuellement les
autorités des gouvernements municipal, de l’État et de la Fédération
prétendent méconnaître ces titres ; c’est pourquoi au moyen de tromperies
les autorités du secrétariat à la Réforme agraire et des différentes
institutions agraires qu’il y a au Mexique essaient de dépouiller les
comuneros d’Ostula de leurs droits ancestraux sur leur terre et leur
territoire, au mépris de toute loi.

Nous dénonçons le fait que l’Organisation des nations unies (ONU) n’a pas
répondu avec la promptitude et la fermeté nécessaires en pareil cas, car
même s’il existe des mesures conservatoires de la Commission
interaméricaine des droits de l’homme en faveur des comuneros, et
l’engagement pris par le haut-commissaire aux Droits de l’homme de respecter
les droits du village d’Ostula, il n’a pas été obtenu de réponse
satisfaisante qui donne la paix et la tranquillité aux habitants de cette
région du Michoacán.

Nous rappelons que depuis toujours nos peuples, nations, tribus et
quartiers se sont organisés pour défendre nos terres et notre territoire,
en créant des formes propres et pacifiques pour garantir la sécurité et la
paix entre nos peuples. C’est pourquoi il nous apparaît naturel et bon que
la garde communale de Santa María Ostula s’acquitte du mandat de ses
assemblées de veiller sur le village, en application de ce que dicte la
Constitution politique des États unis mexicains, la Convention 169 de
l’Organisation internationale du travail (OIT) et les Accords de San
Andrés, textes que nous reconnaissons comme valides et qui ont été signés - tous - par l’État mexicain.

Nous dénonçons le fait que les mauvais gouvernements de la Fédération et
de l’État du Michoacán s’acharnent à réaliser des mégaprojets du grand
capital, comme une route côtière qui ne ferait que dépouiller de son eau,
de ses terres, de ses bois, de ses plages et de sa mer la communauté
d’Ostula, qui ne sert pas les intérêts vitaux des comuneros, et qui en
outre porte atteinte à la mère nature.

Nous manifestons notre reconnaissance à la communauté nationale et
internationale, qui a toujours suivi avec attention notre lutte civile et
pacifique, et se rend présente de multiples manières pour empêcher une
plus grande répression contre nos peuples, nations, tribus et quartiers
qui constituent le Congrès national indigène. Nous étendons également
cette reconnaissance aux personnes et organisations de la société civile
qui sont solidaires de nos résistances. Il est chaque jour plus évident
que le grand capital n’a pas de frontières, que sa seule ambition, c’est
plus d’exploitation et de spoliation, ce qui a pour conséquence une plus
grande violence dans diverses régions du monde.

Nous faisons savoir, nous, les indigènes du Mexique, que face à la guerre
déclenchée contre les frères d’Ostula, et contre les peuples, nations,
tribus et quartiers qui constituons le Congrès national indigène, et face
à l’augmentation des assassinats et de la violence dans notre pays, le
Mexique, nous avons résolu de rendre publique la déclaration suivante :

DÉCLARATION

Premièrement. Nous exigeons le respect de l’autonomie et de
l’autodétermination du village de Santa María Ostula (Michoacán), de la
part des gouvernements de la municipalité, de l’État et de la Fédération,
pour que règnent la paix et la justice parmi nos frères, ainsi que de
meilleures conditions de vie.

Deuxièmement. Nous exigeons le respect et la reconnaissance de la garde
communale d’Ostula, qui protège ses gens et son territoire, qui ne fait
que se défendre de la guerre déclenchée contre nos sœurs et nos frères, et
obéir aux ordres des comuneras et comuneros.

Troisièmement. Nous exigeons que les autorités des gouvernements de la
Fédération, de l’État et de la municipalité reconnaissent les droits sur
la terre, le territoire et la culture qu’ont les frères nahuas du village
d’Ostula, et qu’elles respectent leurs droits ancestraux afin d’éviter
plus de conflits, de morts, de disparitions et d’agressions contre ce
village.

Quatrièmement. Nous appelons la communauté nationale et internationale à
poursuivre son soutien et sa solidarité envers les frères de Santa María
Ostula (Michoacán, Mexique), pour en finir avec la violence, les
assassinats et les disparitions et pour éviter que la répression s’abatte
sur les compañeras et compañeros de la société civile qui s’unissent à la
résistance des peuples.

Cinquièmement. Nous exigeons des autorités du gouvernement mexicain
qu’elles enquêtent sur la disparition forcée de nos quatre frères d’Ostula
(Michoacán) : Francisco de Asís Manuel, Javier Martínez Robles, Gerardo
Vera Orcino et Enrique Domínguez Macías, afin que dans les plus brefs
délais ils se retrouvent avec nous, car au Congrès national indigène nous
avons besoin d’entendre leurs voix pour franchir les pas suivants.

Sixièmement. Nous faisons savoir que toutes les sœurs et tous les frères d’Ostula - parmi lesquels nous comptons aussi nos morts Pedro Leyva et J.
Trinidad de la Cruz Crisóforo - constituent une partie importante du
Congrès national indigène, et que leur lutte et leur résistance sont aussi
les nôtres ; aussi, les agressions, nous les subissons nous aussi. C’est
pourquoi nous chercherons la manière de ne pas permettre davantage
d’assassinats, de disparitions et d’humiliations.

Septièmement. Nous demandons que, face aux agressions et assassinats que
subit le village nahua de Santa María Ostula, les organismes
internationaux comme l’Organisation des nations unies, l’Organisation
internationale du travail, la Commission interaméricaine des droits de l’homme, le haut-commissariat aux Droits de l’homme, entre autres, jouent
leur rôle de sauvegarder la paix et la sécurité de toutes les personnes
qui, de manière pacifique et honnête, luttent pour vivre dignement, sous
des formes légales reconnues au niveau international par les différents
pays qui recherchent la paix, la justice et la liberté. C’est pourquoi
nous exigeons la justice et le châtiment des coupables des assassinats et
disparitions des frères du village d’Ostula et d’autres États.

Huitièmement. Nous exigeons le respect de l’autonomie et
l’autodétermination qui s’exerce dans nos peuples, nations, tribus et
quartiers, et l’arrêt des agressions, de la répression et du harcèlement
des mauvais gouvernements des États et de la Fédération de notre pays, le
Mexique, contre les communautés zapatistes du Chiapas, les frères
wixárikas, les frères purhépechas de Cherán, la Tribu yaqui du Sonora, les
Rarámuris de Chihuahua, les frères amuzgos de Xochistlahuaca et les frères
cocas de Mezcala, les frères ikoots de San Mateo del Mar et de Santa Lucía
del Camino (Oaxaca), les frères des communautés de l’État du Guerrero et
leur police communautaire, entre autres.

Neuvièmement. Nous nous souvenons de nos sœurs et frères assassinés par
les mauvais gouvernements et leurs messagers, et nous leur rendons
hommage. En particulier, en cette occasion, aux frères d’Ostula
(Michoacán), à celles et ceux qui sont tombés lors du soulèvement et de la
résistance de l’EZLN, aux morts d’Acteal (Chiapas) et aux jeunes étudiants
de l’École normale rurale d’Ayotzinapa (Guerrero).

Le CNI renouvelle son exigence de respect de la vie, de l’eau, de la
terre, du territoire, de la culture et des lieux sacrés de notre pays, le
Mexique.

PLUS JAMAIS UN MEXIQUE SANS NOUS

CONGRÈS NATIONAL INDIGÈNE

Fait en la République mexicaine, le 18 janvier 2012.


Traduit par el Viejo.

Source : http://lavoiedujaguar.net/Pour-le-v...